Après un premier « temple stay » mémorable au Mont Minobu lors de mon second voyage au Japon, j’avais envie de revivre cette expérience qui reste à ce jour l’une de mes expériences de voyage les plus mémorables. C’est donc assez naturellement que j’ai décidé d’inclure au programme de notre troisième voyage au Japon une nuit au Mont Koya (Koyasan), célèbre lieu de pélerinage bouddhiste, classé à l’UNESCO, mais aussi l’endroit le plus connu au Japon pour un séjour en shukubo (hébergement en temple). Je le savais, après avoir vécu une expérience si authentique dans un lieu encore si préservé qu’est le Mont Minobu, je risquais d’être un peu déçue de me retrouver cette fois-ci dans une sorte de parc d’attractions version bouddhiste. La comparaison peut paraître un peu exagérée, mais en réalité, on en est pas si loin ! Avec ces dizaines de shukubo littéralement les uns à côté des autres, Koyasan est de plus en plus touristique, et est assez déroutant pour cette raison. Malgré tout, à la tombée de la nuit et au petit matin, on retrouve cette ambiance mystique et spirituelle qui fait vite oublier la foule de la journée. Dans cet article, je partage avec vous mon avis honnête sur ce lieu unique au Japon, et je vous donne tous mes conseils pour réussir votre escapade spirituelle au berceau du bouddhisme Shingon.
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Comment aller à Koyasan ?
L’une des raisons pour lesquelles, selon moi, Koyasan n’a pas encore perdu tout son charme, c’est que cette destination, située dans les montagnes de la préfecture de Wakayama, n’est pas des plus faciles d’accès, et surtout vous ne pourrez pas y aller avec un JR Pass.
Pour rejoindre le Mont Koya, vous serez obligés d’emprunter au moins un train de la compagnie privée Nankai (à moins de participer à une excursion guidée d’un jour). La solution la plus simple et la moins chère, que nous avons donc choisi comme la plupart des touristes, est d’acheter un Koyasan World Heritage Ticket, un pass de 2 jours qui inclut l’aller-retour en train depuis Osaka, le funiculaire vers Koyasan, les bus locaux à Koyasan, ainsi que des réductions sur les visites.
Nous avons choisi la version standard (qui implique un changement de train à Gokurakubashi, sur le même quai donc très facile). L’option express est plus chère et finalement pas si avantageuse, car elle offre moins de flexibilité au niveau des horaires (seulement quelques trains par jour). Il est moins cher de l’acheter à l’avance, mais dans tous les cas vous devrez passer au guichet à la gare de Osaka-Namba ou celle de Shin-Imamiya pour retirer votre pass papier.
Une chose importante à savoir est qu’il n’y a aucun espace pour les bagages dans les trains ou le funiculaire. Mieux vaut donc envoyer vos valises à votre prochaine étape via un service de transfert (très courant au Japon), ou utiliser les consignes à bagage dans l’une des gares d’Osaka. C’est cette dernière option que nous avons choisie, mais attention l’espace est assez limité dans les deux gares de départ des trains Nankai.
Le funiculaire est ce qui rend parfois Koyasan inaccessible ou accessible avec un énorme détour lorsque celui-ci ne fonctionne pas pour des raisons météorologiques. Ca arrive rarement, mais ça arrive, et c’est d’ailleurs à cause de ça que nous avions du annuler notre visite de Koyasan en 2017, puisque nous avions en effet au départ prévu de l’intégrer à notre tout premier voyage au Japon, avant que le funiculaire ne soit mis hors service durant des mois suite à un typhon. Le bon côté, c’est que celui-ci semble avoir à présent été rénové et devrait mieux tenir aux prochains passages de typhon, en tout cas je l’espère !
Depuis la station d’arrivée du funiculaire, il vous faudra encore une bonne trotte à pied pour rejoindre le centre du village. C’est pourquoi les bus sont très pratiques (à condition de bien noter les horaires !) pour se déplacer à Koyasan, qui est organisée tout en longueur. Au total, il faut compter deux bonnes heures avant d’arriver à destination depuis Osaka, avec un billet de train standard.
Attention également : Koyasan se trouve à plus de 800 mètres d’altitude et il y a un gros changement de température par rapport à Osaka : nous n’avions pas prévu d’avoir si froid alors qu’il faisait si chaud en ville. N’oubliez pas de prendre une bonne veste !
Mon séjour en shukubo (temple stay) à Koyasan
Koyasan est reconnu comme l’un des hauts lieux sacrés du Japon depuis plus d’un millénaire, et aujourd’hui on y compte pas moins d’une centaine de temples dans ses environs. Une cinquantaine de ceux-ci sont des « shukubo », c’est-à-dire des temples qui offrent des hébergements pour les touristes et pélerins de passage : c’est à Koyasan que vous trouverez, de loin, la plus grande concentration de ce type d’hébergements au Japon.
Avec la montée en popularité de cette destination, notamment auprès des touristes européens (nous n’avons jamais entendu autant parler français au Japon qu’ici), les tarifs de ces hébergements ont malheureusement très fortement augmenté ces dernières années. J’avais noté les tarifs en réservant en 2017, et 6 ans plus tard les tarifs de beaucoup de shukubo avait doublé, voire plus. Cela reste compréhensible quand on voit la demande énorme qu’il y a : celle-ci est clairement supérieure à l’offre, et les temples les plus accessibles peuvent être complets presque un an à l’avance aux périodes les plus populaires.
L’automne est une période particulièrement demandée, car les couleurs des arbres (momiji) offrent une expérience unique. Nous pensions avoir réservé juste avant cette « haute saison », pour avoir finalement la surprise d’avoir un pic de couleurs qui a eu lieu plus tôt que les années précédentes, ce qui fait que je n’avais jamais vu d’aussi des couleurs d’arbres aussi vives qu’ici ! Je ne vais pas me plaindre, mais nous n’étions clairement pas les seuls pour admirer ça.
Après avoir un peu hésité avec un autre temple stay Koyasan Sanadabo Rengejoin (chambres plus « modernes » mais aussi plus cher), nous avons finalement opté pour un petit temple qui est loin d’être le plus « connu » mais qui semblait pouvoir nous offrir une expérience un peu plus authentique : le Koyasan Shukubo Daimyououin.
Malgré tout, j’ai rapidement compris que cette expérience ne serait pas aussi authentique qu’à Minobu (comme je m’en doutais) quand on a découvert au check-in que la chambre avait directement été mise en mode nuit, pour « gagner du temps » (c’est à dire avec les futons déjà installés). C’est bien la seule fois que ça nous est arrivé et c’était un peu déconcertant quand l’on connait « l’étiquette » des ryokans. Mais je pense que le public cible de Koyasan est clairement un public plutôt « novice », qui ne se rendra même pas compte de ce genre de détails. Cette remarque concerne donc plutôt les voyageurs qui auraient déjà, comme nous, voyagé assez longuement au Japon.
Cette petite déception mise de côté, le reste de l’expérience a quand même plutôt été à la hauteur de mes attentes. Le cadre est charmant, avec les chambres entourant un très joli jardin japonais central. La situation était aussi parfaite, puisque c’est l’un des plus proches du cimetière Okunoin, ce qui était très pratique pour en faire la visite de nuit (qui est l’expérience à ne surtout pas manquer à Koyasan !).
Il y avait aussi d’agréables bains publiques séparés par sexe (que j’ai toujours eu pour moi toute seule – bien pratique pour se réchauffer quand tu as laissé ta veste à la consigne bagage !).
Côté repas, comme traditionnellement en shukubo, la demi-pension était comprise. Chaque chambre a son petit salon privé où l’on prend à la fois le repas du soir et le petit-déjeuner. Je dois dire que la cuisine bouddhiste (« Shojin Ryori », 100% végétalienne) reste l’un de mes styles de cuisine préférées au Japon, et tout ce que nous avons mangé était aussi beau que bon.
Enfin, ce que j’attendais beaucoup de ce séjour, c’était aussi de pouvoir revivre l’expérience de la prière du matin, qui m’avait fortement marquée à Minobu. Ici, tout est bien organisé, puisque les moines du temple permettent à leurs « clients » de participer activement à la prière, en nous invitant à verser de l’encens, utilisé pour que votre prière puisse atteindre les dieux (c’est normamement réservé aux bouddhistes pratiquants). À la fin, les moines nous ont même remis un petit papier avec un mot de bénédiction pour notre voyage, ainsi qu’un talisman protecteur, que j’ai depuis toujours dans mon portefeuille… Ca valait le coup de se lever aux aurores.
Voir plus de photos et les tarifs actuels ici.
Que voir à Koyasan ?
Si pour moi, le grand avantage de rester dormir à Koyasan est de pouvoir profiter de la prière du matin et de la balade nocturne dans le plus grand cimetière du Japon (voir plus bas), il y a tout de même quelques autres visites à ne pas manquer. En arrivant fin de matinée, cela nous a laissé bien assez de temps pour faire ces visites avant l’heure de check-in du shukubo, et nous sommes directement repartis après le petit-déjeuner le lendemain matin. Une nuit est largement suffisante à Koyasan.
Kongobu-ji, temple principal du Shingon
A notre arrivée, nous avons directement pris le bus jusqu’au Kongobu-ji, qui est le temple principal du bouddhisme Shingon et le coeur spirituel de Koyasan. Ce temple classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO est aussi connu pour ses peintures murales splendides (et qu’on ne peut malheureusement pas prendre en photo). La visite, payante et à faire à pieds nus, vous permet aussi de découvrir le plus grand jardin sec de pierres (Banryutei) du Japon.
Le chemin vers la pagode Danjo Garan
Depuis Kongobu-ji, je vous conseille ensuite d’emprunter la jolie promenade bordée d’érables aux couleurs vives (« Jabara-michi Temple Road ») qui mène à un ensemble de plus petits temples dominés par la pagode de Danjo Garan, qui abrite une statue de Bouddha.
Dai-mon Gate
Nous continuons ensuite à pied jusqu’à la porte de Dai-Mon, elle aussi classée à l’UNESCO, qui marque l’entrée de la ville. C’est de ce point, et après avoir mangé dans un petit resto voisin, que nous reprendrons un bus pour nous emmener à notre shukubo.
Le cimetière d’Okuno-in
Nous terminons en beauté par la visite la plus inoubliable de Koyasan, celle du fameux cimetière d’Okuno-in, le plus grand cimetière du Japon (on y compterait plus de 200.000 tombes), que nous avons en plus visité un peu par hasard de calendrier… le jour d’Halloween !
Je vous recommande de visiter le cimetière de jour et de nuit. Nous avons fait notre première balade juste avant le repas du soir, avant que j’y retourne (oui, Monsieur avait trop froid !) en fin de soirée. A ces heures il n’y avait quasiment personne.
Le cimetière est très étendu mais pour bien le découvrir, je vous conseille d’emprunter le petit chemin qui débute juste après le temple de Shojoshin-in. Les tombes qui semblent alignées sans fin en plein milieu de la forêt de cèdres créent une atmosphère indescriptible. Il faut vraiment y venir pour comprendre.
En continuant tout droit jusqu’au bout du chemin, vous arriverez au mausolée d’Okuno-in, l’endroit le plus sacré de Koyasan (les photos sont interdites depuis le pont qui y mène), dédié au moine ayant créé le cimetière qui est aussi le fondateur du bouddhisme Shingon, Kobo Daishi. C’est notamment là que se trouve un hall rempli de lanternes (Torodo), qui brûleraient en sa mémoire depuis plus de 1000 ans. Incroyable comme endroit !
Après cette visite, vous pouvez rentrer en prenant le chemin qui mène à l’arrêt de bus d’Okuno-in, ou revenir sur vos pas (le soir, il n’y a pas de bus donc c’est plus agréable de revenir sur ses pas). C’est dans cette dernière partie que vous pourrez notamment voir certains des monuments commandités par des compagnies pour leurs employés : il y a même une entreprise d’extermination d’insectes qui en a fait en mémoire de tous les insectes qu’ils ont tué !
La nuit, l’atmosphère y est encore plus mystique et magique. C’est pour cette raison que des visites nocturnes sont organisées. J’ai préféré attendre la fin de ces visites pour m’y aventurer seule. Et quel souvenir !
Manger à Koyasan
Malgré la haute saison et l’afflux de touristes, nous avons été assez étonnés de constater que de nombreux restaurants étaient fermés le midi. J’avais notamment repérés plusieurs restaurants de tofu, mais sans succès. Finalement, c’est près de la porte de Dai-mon que nous avons finalement trouvé un petit restaurant traditionnel où nous avons pu prendre un délicieux lunch végétarien : Tsukumo, un restaurant de kamameshi (riz en marmite individuelle). Bon, copieux et pas cher du tout.
Nous avons ensuite pris un petit dessert dans une pâtisserie locale très réputée, みろく石本舗 かさ國. Mieux vaut y arriver tôt : il ne restait plus grand-chose quand nous sommes passés en milieu d’après-midi !
Et évidemment, les repas du soir se prennent en shukubo, donc presque toutes les adresses « extérieures » sont fermées le soir.
En bref : Minobu garde ma préférence pour son côté plus authentique, mais Koyasan reste une destination à visiter au moins une fois. Et si vous savez bien à quoi vous attendre, il n’y a pas de raison d’être déçu. Privilégiez juste un temple avec de bonnes « reviews » et ne ratez absolument pas la sortie nocturne !
Pour poursuivre la lecture :
- Mon itinéraire de 3 semaines de la Corée du Sud au Japon
- Que faire à Osaka ? Mon itinéraire de visite en 1 ou 2 jours
- Une journée aux Universal Studios Japan à Osaka
- Visiter Kyoto : mon guide complet avec toutes les visites incontournables
- Balade nature à Kyoto : Arashiyama, sa forêt de bambous et ses singes
- Une journée à Fushimi Inari & Nara : mon itinéraire depuis Kyoto
Texte et photos : Emmanuelle Hubert et Kevin Berger